L’industrie maritime sera contrainte de s’électrifier pour se conformer aux réglementations limitant les émissions atmosphériques de NOx et de SOx, les gaz nocifs produits par les systèmes de propulsion à moteur à combustion. Les batteries de traction sont peut-être les plus aptes, parmi les différentes technologies viables, à s’adapter économiquement et techniquement aux besoins de puissance, d’énergie et de distance requis par les grands navires transocéaniques. Mais elles ne sont pas les seules
Les réglementations environnementales susmentionnées, qui imposent aux compagnies maritimes d’être neutres en carbone d’ici à 2050, et l’augmentation du coût des carburants rendent nécessaire l’accélération de l’efficacité énergétique des grands navires de charge, et donc la réduction de leurs émissions. L’un des moyens d’y parvenir est de recourir à la technologie ancestrale des voiles.
Le vent est le meilleur allié des navires
Les voiles ont été essentielles à la navigation commerciale jusqu’après la Seconde Guerre mondiale. Leur format a posé deux problèmes qui ont conduit à leur abandon, au-delà de la navigation de plaisance, conduisant les grands navires à utiliser la vapeur et le diesel. Le premier est qu’elles nécessitent des équipages nombreux et le second est qu’elles dépendent totalement de l’adéquation du vent pour atteindre la vitesse d’avancement.
Par exemple, un navire de 921 tonnes a besoin d’un équipage d’environ 30 personnes pour manipuler les voiles, alors qu’un porte-conteneurs moderne de 196 000 tonnes n’a besoin que de 13 membres d’équipage, la plupart d’entre eux manipulant des machines et des panneaux à boutons plutôt que des cordages.
La technologie au secours des voiles
Depuis la crise énergétique des années 1970, l’idée de relancer l’utilisation des voiles pour réduire les coûts de carburant a refait surface. La recherche a permis de moderniser ce système encombrant, notamment avec des versions modernisées. Parmi les idées récentes, on peut citer l’utilisation de grands cerfs-volants, de voiles composites, de voiles gonflables ou encore l’utilisation de la coque du navire lui-même comme voile.
GeCheng Zha, professeur d’ingénierie aérospatiale à l’université de Miami, a travaillé sur une approche basée sur les rotors Flettner, qui étaient déjà utilisés dans les années 1920, et qui fonctionnent en utilisant l’effet Magnus basé sur de grands cylindres rotatifs installés sur le pont du navire.
Lorsque le vent passe au-dessus de ces cylindres rotatifs, une différence de pression est générée entre les côtés du cylindre en raison du changement de vitesse de l’air, ce qui produit une poussée perpendiculaire au flux du vent. Cette poussée supplémentaire aide à propulser le bateau, réduisant ainsi la nécessité d’utiliser les moteurs principaux et donc la consommation de carburant.
Sur la base de cette idée, Zha applique une modification essentielle qui réduit les besoins en énergie et permet de se passer de tout moteur électrique, car les cylindres de CoFlow Jet ne tournent pas. Ils utilisent le vent qui les traverse pour les souffler de l’autre côté du cylindre, générant ainsi un déséquilibre de pression et une poussée sur toute sa longueur.
Selon Zha, ce système est extrêmement efficace et peut fournir 100 % de la poussée nécessaire pour déplacer le bateau, avec un coefficient de portance très élevé et une réduction significative de la traînée aérodynamique. Contrairement aux rotors de Flettner, il n’a pas de pièces rotatives et permet d’économiser jusqu’à 50 % de carburant sur les grands cargos et 90 % sur les navires plus petits.
Cela peut paraître surprenant, mais il faut savoir qu’un voilier peut réduire sa consommation de carburant de 100 % en n’utilisant que des voiles et en arrêtant les moteurs, bien que cela dépende de la force et de la direction du vent. Un autre avantage du système CoFlow Jet est qu’il peut être installé sur des navires existants et que les cylindres peuvent être rétractés pour faciliter l’entrée et la sortie du port.
« Ce qui est ancien est à nouveau nouveau nouveau », a déclaré M. Zha. « Avec les avancées technologiques actuelles, la propulsion éolienne est une alternative efficace aux moteurs diesel. Le principal avantage est qu’elle est respectueuse de l’environnement et qu’elle constitue un moyen efficace de décarboniser le secteur du transport maritime, qui est responsable d’environ 3 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Le secteur du transport maritime a été réticent au changement en raison de la puissance des moteurs diesel, mais aujourd’hui, la pression augmentant, il devra s’adapter volontairement ou non.